'The Love Album', deuxième album d'AnaÉis, se résume à une longue attente. On attend le jeu de mot assassin, la phrase définitive, on guette avec impatience toute réplique susceptible d'épingler la niaiserie habituelle des chansons d'amour, voire des relations amoureuses tout entières. En vain. La délicieuse insolence de 'The Cheap Show' a laissé place à des paroles plus banales et quasiment dénuées d'ironie. Evidemment, AnaÉis a le droit d'être amoureuse. Mais on est presque déçus de découvrir qu'elle est une fille comme les autres, jalouse, un peu fleur bleue et ses textes pourraient presque être chantés par Rose. L'humour ne subsiste qu'à travers les moments parlés, une solution de facilité, et l'irruption anachronique d'expressions actuelles (' Tu me fais la gueule' dans 'C' est qui la fille sur la photo' ...). Même 'Elle me plaît', dont on espérait monts et merveilles en termes de subversion rigolote, ne consiste qu'en une succession de clichés romantiques (' C' est elle mon film préféré'), la seule différence étant qu'ils s'appliquent à une fille. Bref, c'est du côté de la musique que réside l'intérêt de 'The Love Album'. Les ambiances sont très variées, entre un 'I Love You' garage et un 'Malheureux' aussi sucré que certains tubes du début des sixties. Les arrangements réservent également quelques trouvailles particulièrement ingénieuses : l'intro suraiguÉe de 'Moi qui croyais' est superbe, tout comme le faux duo avec Chris Isaak sur 'Sij'avais su que notre amour' (la chanteuse superpose sa voix en anglais et en français, les deux textes restant parfaitement audibles). Surtout, on découvre qu'AnaÉis est une interprète brillante, capable de couvrir plusieurs octaves sans rien perdre de sa fraîcheur. Cette souplesse vocale, les textes du 'Cheap Show' l'avaient un peu éclipsée. Espérons que le troisième album parvienne à les marier.